Le 31 mars 2010
NOUVELLE TEMPETE :
LA DIGUE RAPIDEMENT REPAREE A TENU
Les premières images
(mises
en ligne le 4 mars) de la tempête sont plus bas.
Cette nuit : nouvelle tempête d'ouest pendant une grande
marée. Le phénomène n'avait pas l'ampleur de celui
du mois dernier. Mais il est certain qu'il aurait fait du
dégât si nous n'avions pas connu tous ces
événements : d'abord le chaos général de la
dernière tempête, puis l'énorme effort de
réparation.
Cette photo a été prise ce matin au même endroit
que les premières photos accessibles par le lien ci-dessus.
La masse grise au milieu, c'est la nouvelle digue, le liseret clair
à son pied : 2 rangées de planches appuyées sur
des piquets pour soutenir cette masse de terre encore fraîche.
Des engins comme celui-là, il y en a encore une petite vingtaine à
travailler, prêt à réintervenir en urgence là où ça commence à
déborder. Cela s'est produit hier sur Sissable, mais tout a été vite stoppé.
Il y a un mois, nous ne voyions pas comme cela serait possible.
Pour amener la pelleteuse et les matériaux,
il a fallu faire une piste qui traverse la saline. Cela ne
va pas sans sacrifier une partie de cette saline, mais au point
où elle en est....
Cette saline, comme d'autres, ne pourront pas produire normalement cette année.
Des pieux en bois ont été
apportés pour être plantés au milieu de la digue
réparée. En effet la terre nouvellement apportée
n'a aucune solidité, le poids de l'eau pourrait la pousser.
Nous sommes impressionnés par la
vitesse à laquelle ont été effectués les
travaux. Néanmoins l'ensemble est encore fragile puisque non
protégé par une maçonnerie. Les responsables
parlent de mettre un géotextile et des rochers côté
mer.
Il est peu probable que les brèches soient toutes
rebouchées à la prochaine marée.
Peut-être
à celle d'après, qui a un coefficient important.
Nous voyons néanmoins que les pouvoirs pulics
déploient
des moyens inhabituels, à la mesure de cette catastrophe.
Le 10 mars 2010
TEMPETE : LES REPARATIONS AVANCENT
Les premières images
(mises
en ligne le 4 mars) de la tempête sont plus bas.
Encore quelques images....
Des brèches ... encore
des brèches ici sur l'étier du grand
pont. C'est par un brèche similaire à celle-ci qu'
un bateau d'environ 10m est
entré dans une saline, ses amarres avaient
été rompues par la tempête.
La même brèche
vue de plus loin.
Souvent les brèches sont
comme les champignons ... elles sont rarement seules.
Celle-là
est
juste un peu plus loin, en face. Gilles Dessomme, le paludier de la
saline voisine, a essayé de sonder la
profondeur
de cette "gouille" (nous nous surprenons à utiliser un
vocabulaire de torrent) : la pelle disparait dedans. Elle fait donc
plus de 2m.
Un "track",
il parait que ça s'appelle ainsi. C'est la
première fois
que nous voyons ce type d'engin sur le marais. Il semble
adapté
au transport de matériaux sur des sols à faible
portance.
Ici, il amène de la terre vers une brèche.
Autre engin que nous
n'avions jamais
vu : une pelle amphibie (montée sur une espèce de
barge).
Elle va chercher du matériau sous la surface de l'eau et le
met
directement sur la digue, là où cette digue est
trop
faible pour accueillir un engin traditionnel.
Il est peu probable que les brèches soient toutes
rebouchées à la prochaine marée.
Peut-être
à celle d'après, qui a un coefficient important.
Nous voyons néanmoins que les pouvoirs pulics
déploient
des moyens inhabituels, à la mesure de cette catastrophe.
Pour l'instant, les travaux ne consistent qu'à "poser des
rustines" sans traiter le fond du problème : la faiblesse de
cette digue.
Il faudrait un ouvrage "carossable" (uniquement pour les
vélos,
pour préserver le site), qui puisse être
fréquenté par un engin lorsque c'est
nécessaire.
Dans le cas présent, c'est bien une route qui a
arrêté la marée.
Mais chaque chose en son temps...
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Le
8 mars 2010
TEMPETE : LES REPARATIONS ?
Nous profitons de cette
période de mort d'eau pour essayer
de faire les premières réparations.
Pour moi, c'était là, l'occasion de revoir
certains secteurs du marais.
Voici
quelques images et explications.
Celle qui a limité les
dégâts : la route du marais au
bourg de Batz.
A l’ouest : les
brèches et des
« vauds »
titanesques, à l’est des
dégâts plus humains.
Nous
ne cherchons donc
pas d'abord à réparer à
l’Ouest, ce
serait peut-être un travail à refaire si les
engins ne parviennent pas à
étancher avant la prochaine marée.
Ce
vaud (effondrement) chez Sylvain Vinet
sera réparé demain.
C’est le même, nous ne sommes pas
passés loin de la
catastrophe : la brèche est
à peine entamée. Quelques minutes de
débordement de plus et ce n’était plus
gérable à la main.
Ce
vaud est réparé ce soir. Il y en avait quatre qui
menaçaient cette saline du Cham, la plus
grande et peut-être la
meilleure de Batz-sur-Mer. Nous étions une petite
vingtaine et nous avons réussi à
les faire pendant la journée. Si rien ne lâche,
cette saline produira cette
année.
Quand
l’eau a envahi le marais, elle l’a fait
avec une telle
puissance qu’elle a charrié terre, cailloux
…
Là,
nous ne comprenons pas d’où viennent
ces mottes de
terre. Cette vasière n’a pas de brèche.
Elle a été inondée par
« contagion » sans
dégât apparent sur les talus. Mystère.
La
vasière des Baules fait plus de 10 ha. Au
milieu, loin
des digues et des brèches, il y a ces mottes de terre
également. Par bonheur, les
collègues ont réussi à la vider, ce
qui va permettre de travailler dedans et de
mieux vider les salines qui l’entourent.
Oui,
c’est le comble : la digue est ouverte
de
tous les
côtés et nous
n’arrivons pas à vider. Parce que nos
tuyaux ne sont pas faits
pour évacuer une telle quantité d’eau,
et parce que, parfois, nous n’arrivons
plus à les trouver dans le chamboulement de
terre…
Selon la LEM (loi de
l’emm… maximum), les
brèches sont assez
profondes pour permettre à l’eau de rentrer
à marée haute, mais pas assez pour
lui permettre de sortir à marée basse. Nous sommes donc
obligés de faire
d’autres brèches pour
évacuer, 20cm par 20 cm, pour ne pas prendre le risque que
l’eau emmène le talus.
Ici
nous sommes devant l’une des nombreuses brèches de
la
vasière de la Tranche. En
face, de l’autre côté de
l’étier : une autre
brèche et son cône de
déjection : le courant a porté des
pierres à plus de 100m.
Une buse en béton, au moins 50kg, a
roulé au-delà du champ de la photo.
Cette vasière de la
Tranche a été durement
touchée.
Pour l’heure,
nous
ne sommes intervenus à la main seulement pour
qu’elle se
vide. Demain les pelles
essaieront d’intervenir. Elles y resteront plusieurs jours.
Derrière ces
dégâts de digue, il y a les
dégâts moins
spectaculaires à l’intérieur des
salines.
En passant d’une saline dans l’autre,
l’eau emmène une partie
du talus. Il faudra la remettre à sa place.
Quelques fois, ces
morceaux de talus vont jusque dans les œillets,
lieu où le sel se forme
(le saint des saints pour le paludier)
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Page
du 4 mars
BATZ-SUR-MER DEUX FOIS
DÉVASTÉE
La conjonction, soit disant exceptionnelle, de 2008, s’est
reproduite en pire : tempête de Nord-Ouest pendant une grande
marée.
Cette photo est prise 36 heures après
la tempête du dimanche
28 février. La marée sera haute dans
deux heures. Au premier plan le marais salant
déjà inondé. Derrière, la
mer que l'on ne voit pas habituellement. Et cette terrifiante
ressemblance entre les deux.
La mer voudrait-elle reprendre
la place qu'elle occupait il y a quelques siècles?
Voici par le menu le récit
de la manière dont nous vivons
cette catastrophe.
1
– les intuitions
2
– les prévisions
3
- La tempête
4
– les dégâts
5
– Et maintenant ?
1
– les intuitions
Mercredi
24 février, quatre jours avant la grande
tempête,
plus personne ne s’en souvient mais il y a eu un
sérieux coup de vent. Nous avions un chantier collectif de
curage de bondre (ces canaux qui nous amènent
l’eau de
mer).
Difficile de travailler dans ces conditions puisque la mer ne
«
déchale » pas. Le niveau de l’eau
était trop
haut.
Mais Christophe BERNIER, un collègue qui malgré
son
âge raisonnable est un des plus anciens paludiers,
relativisait
à juste titre :
«En fait, il vaut mieux que ce coup de vent arrive
maintenant, Si
c’est dans une semaine, avec les coefficients qui arrivent,
ce
serait la cata comme en 2008…. ».
Et bien … raté, ou trop juste. En fait
c'est bien pire qu'en 2008.
2
– les prévisions
Quand la tempête du dimanche 28 a été
annoncée, nous avons tous eu le même
réflexe :
consultation très précise des
prévisions.
Et là, l’impression est celle que procurent les
bons
numéros du loto, mais à l’envers . Tous
les
paramètres concourent à la catastrophe.
- Vent orienté Nord-Ouest. Les vagues attaqueront
donc la partie la plus fragile du marais,
- Maximum de la tempête au même moment
que la marée.
- Une dépression énorme, la mer monte
plus haut quand
la pression est faible. Dans ce cas la surcote sera
supérieure
à 1 mètre. Sur un coefficient de 104, ce qui
correspond
déjà à une grosse marée.
Puis
l’attente, avec des consultations incessantes des
prévisions qui se modifient parfois. Mais là non.
La veille, nous surveillons tous les indices. Des nuages passaient vite
mais du sud vers le nord. Et l’aiguille du
baromètre
descendait dans les parties inexplorées du cadran.
Avant d’aller dormir, je sors regarder la direction des
vents, ils sont toujours sud. Pourvu…
3 - La tempête
A quatre heures du matin, nous entendons le vent. La tempête
est là,
aussi énorme que silencieuse à cause de
l’orientation de notre maison.
Je pointe le nez par la porte. Je suis d’abord
impressionné par la
douceur de la température. Et le constat terrible : les
vents ont bien
la direction annoncée.
La crainte devient une certitude, la digue lâche ou
lâchera.
C'est la première image que nous avions au matin. Le vent
avait
porté sur notre jardin, mais ce
phénomène n'est
presque pas extraordinaire chez nous. Les jouets des enfants seront
vite remis en place. Nous savons que les
dégâts
seront ailleurs, au marais, et ne seront pas liés au vent
mais
à la mer.
Je prends la voiture pour faire le tour. Avant même de voir
le
marais je constate la vase sur la route. Je
m'arrête pour
me joindre à un groupe de collègues paludiers et
j'apprends les nouvelles : la mer est montée jusque dans les
habitations. Un voisin a encore 40 centimètres dans sa
maison.
Cette tempête a une part de mystère.
L’eau a
inondé clairement le marais et les habitations les plus
basses.
(le port du Croisic a été
particulièrement
touché)
Mais elle est aussi montée beaucoup plus haut comme en
témoigne la vase dans les rues plus
élevées et l'eau salée à
l'intérieur
des maisons.
Mais de cette montée impressionnante, nous avons des traces,
mais aucun témoin direct.
Seul un voisin paludier a vu 5 cm d’eau dans sa
maison.
Le temps d’aller réveiller la maison
d'à
côté, l’eau est repartie.
Comment cela a-t-il pu aller si vite ? Certains émettent
l’idée d’une vague en plus de la
montée
exceptionnelle de la marée.
Les ammoncellements de
"laisse de mer" sur les plus hauts talus du marais en
témoigneraient également.
4
– les dégâts
En approchant du marais, le constat est immédiat :
c’est
nettement pire qu’en 2008. Cette
année-là, les
salines exposées avaient progressivement
été
envahies par la mer, marée après
marée.
Là, du marais, nous ne voyons plus que le squelette : les
talus
les plus forts. Et cette image terrible : la digue en dentelle. Au
travers des brèches, nous voyons les vagues, pas les
vaguelettes
de marais, non, les vagues océaniques.
Et là cette
pensée : le marais serait-il devenu la mer cette nuit ?
Un
collègue a perdu 20 tonnes de gros sel
qu’il avait stocké sur le
marais, un autre a perdu de la fleur de sel dans une salorge
inondée.
Le paludier qui avait stocké ce sel dans son jardin a eu
chaud :
l'eau s'est arrêté à 10 cm. Il l'a
ensuite
protégé à la hâte en vue des
marées
suivantes aux coeffcients plus élevés.
Mais
sans
dépression, l'eau ne remontera pas aussi haut.
Le dimanche soir, il
était
impossible de cerner l'ampleur des dégâts, nous
avions
l'impression de voir des brèches partout.
Nous étions abattus. Mais les médias nous
incitaient
à penser que nous nous en tirions bien. Patrick PICHON, un
collègue pourtant sérieusement
impacté, me dit :
« Attends, on ne va pas se plaindre, il y en a qui sont en
pyjama
mouillé sur des terrains de basket. » Nous ne
savions pas
encore que la catastrophe avait pris un niveau bien plus grave en
Vendée.
L’intercommunalité et notre syndicat des digues
essaient
de faire l’inventaire des dégâts sur le
marais, mais
ces derniers s’empirent à chaque marée.
Le 3 mars, nous en étions à
30 brèches
d’un total de 400 mètres linéaires,
certaines de ces
brèches sont dans des zones hors
d’accès des engins.
On entend le chiffre de
1000ha
de marais inondés hors d'usage pour l'instant.
A titre personnel, nous
n'avons aucun dégat :
- Nos marais ont des talus surdimensionnés, ce qui
est tout
sauf un avantage au quotidien. Mais dans de telles circonstances, c'est
une chance.
- Le stock de sel s'est également bien
comporté
: les bâches, lestées par des filets, n'ont pas
bougé.
les mulons sont hors de portée de la mer.
5 – Et
maintenant ?
Aujourd’hui, les pouvoirs publics semblent
prendre la mesure
de la situation et engager des moyens importants :
annonce de budget,
réquisition des entreprises de BTP, fonctionnaires qui ne
rentrent plus chez
eux…
Mais pour l’instant, nous
ne voyons pas comment il sera
possible de réparer rapidement les zones inaccessibles. Habituellement, nous
réparons et entretenons ses secteurs de digues à
la main. Mais
avec cette tempête, les volumes sont
énormes, la main d’œuvre
paludière ne suffira pas.
Si vous souhaitez en connaitre plus
sur les
méthodes et l'organisation du marais pour réparer
et
entretenir cette digue, vous pouvez vous reporter à la page
que
nous faisions en 2008. La
voici.
En allant faire les photos, je me
suis
méfié de ne pas me faire surprendre par la
marée
qui remontait. J'ai bien fait... Heureusement que j'avais mon
équipement de paludier.
J'ai
pu
constaté que nous ne sommes pas les seuls à
être
perturbés par cette inondation. Les oiseaux limicoles
cherchent
de nouveaux secteurs de gagnage. Les sangliers qui occupent le marais
en hiver doivent également être perdus. Ils ont
emprunté le même chemin que moi.
GAEC LA SALORGE ROUGE - Pascal et Delphine DONINI,
paludiers - route des Marais, KERVALET - 44740 BATZ-SUR-MER - tél
: 06 32 44 71 38